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Liège, Belgium
Né à Bruxelles dans une famille d'origine grecque, turque, albanaise et bulgare. Etudes secondaires gréco-latines. Licence en Histoire de l'art, Archéologie et Musicologie de l'Université de Liège. Lauréat de la Fondation belge de la Vocation. Ancien journaliste à La Libre Belgique et La Gazette de Liège. Actuellement Chargé de mission développement et médias à l'Orchestre Philharmonique Royal de Liège. Directeur artistique-adjoint du Festival des Nuits de Septembre. Enseigne l'Histoire sociale de la musique aux Alumni de l'Université de Liège.

dimanche 2 mars 2008

Liège et Charleroi, des modèles de laideur?



Selon une dépêche de l'agence Belga, les Néerlandais considèrent Charleroi comme "l'endroit le plus laid au monde". Liège arrive à la deuxième position juste avant la ville de Nikel en Russie. Le sondage réalisé auprès de 2.900 personnes du Volkskrantreizen fustige en réalité trois métropoles enlaidies par une industrie minière vieillissante.

Il est sans doute injuste que Liège fasse partie du trio de tête alors qu'elle regorge de trésors architecturaux (toute la rue Hors Château est par exemple une merveille). Et pourtant, comme en amour, c'est la première impression qui compte et force est de constater qu'un étranger qui arrive dans la Cité ardente a le sentiment de débarquer dans une ville des anciens pays de l’Est. A-t-il tort? Pas vraiment, hélas... A force d’avoir le nez dessus, les habitants finissent par ne plus voir les gâchis esthétiques opérés. Si l'on reprend des photos du vieux Liège, on ne peut qu'être consterné par le laisser-aller urbanistique de ces cinquante dernières années ? On ne compte plus les maisons délabrées (du Carré, du quai de la Batte ou du quartier d'Outremeuse), les chancres urbains (les quais qui longent le Musée de la métallurgie), les nombreux trottoirs défoncés et surtout les gifles architecturales qui ont meurtri la ville : la place Saint-Lambert est totalement défigurée depuis la construction de l'espace Saint-Michel et des galeries Saint-Lambert. Les annexes récentes du Palais de Justice sont une rare leçon d'anti-architecture.



Et comment ne pas exécrer le complexe de la cité administrative, l’hôpital de la Citadelle, les Chiroux, la Galerie Opéra, les immeubles du Quai de Rome et tous ces affreux bureaux des grands boulevards qui ont usurpé la place d'anciennes maisons de maître. Liège continue les massacres (récemment deux maisons anciennes face à l’église Saint-Jacques ont été massacrées). Il n’y a hélas aucune raison pour que cela s’arrête tant que le monde politique et, avant lui, l’ensemble des citoyens n’auront pas pris conscience que l’âme d’une ville est dans son patrimoine et son histoire. Apprendre à aimer les trésors d'une ville ne fait visiblement pas partie de l'éducation des Liégeois. Ceux-ci préfèrent ergoter sur le devenir de la future esplanade devant la gare des Guillemins, rejetant le projet de Calatrava parce qu'il est "trop ambitieux pour Liège", "démesuré, "pharaonique". C'est pourtant la première fois que Liège fait appel à un architecte digne de ce nom qui fait montre d’une cohérence urbanistique totale, d’une logique esthétique absente dans tout le reste de la ville. Son projet fera parler de Liège internationalement et attirera dans la ville un public du monde entier (les massacreurs de la Place Saint-Lambert n'auront jamais ce privilège...). En attendant, on n'est même pas fichu d'accueillir correctement le visiteur qui met les pieds dans la cité tant les abords de la gare font désordre. Pourquoi dès lors tant de cris, de réserves, d'âmes effarouchées devant le projet de l'architecte catalan ? On ne peut pas se proclamer première ville de Wallonie sans se donner les moyens de ses ambitions. Et s’étonner ensuite que les investisseurs ou les touristes préfèrent passer leur chemin. Liège a des atouts patrimoniaux majeurs. A l'instar de Lille ou de Bilbao, il est temps que la Cité ardente dégage de vrais moyens pour mettre en valeur ses trésors et qu'elle cesse de céder aux démons de la spéculation immobilière. C'est ainsi seulement qu'elle parviendra à une reconnaissance mondiale.

4 commentaires:

Pierre-Jean a dit…

Ah, mais mon cher Stéphane, cette question du patrimoine est un sujet qui m'est cher. Et je regrette, tout comme toi, l'absence totale de conscience "patrimoniale" dans ce pays. Rien qu'à Bruxelles, combien de fois, la faucheuse architecturale fait des ravages et continue... Lors de mes recherches sur l'Expo 58, j'ai rencontré un architecte belge qui a longtemps été membre de la commission qui rendait des avis sur les classements. Une année, le bourgmestre de BXL menaçait de raser la plus ancienne maison de la ville pour la remplacer par un parking !!!
Bien évidement, il a signé l'ordre de destruction et qq les architectes lui ont fait remarquer son erreur monumentale, il a pas trouvé de mieux à dire :"ben, maintenant, c'est une autre la + ancienne".
De même, il me racontait qu'il se promenait à Copenhague et qu'il se mit à photographier un immeuble de Jacobsen. Un passant l'aborde et lui parle de l'histoire de ce batiment...Je vois mal cette scène se passer à Bruxelles...Un ami habite à Bruxelles en face du Palais de la Folle Chanson (à Ixelles, chef d'oeuvre de l'art nouveau résidentiel haut de gamme) me faisait remarquer que depuis qu'il habitait ici, personne ne lui avait parlé de ce bâtiment...
C'est d'autant plus curieux qu'en France, la "patrimonite" est presque une maladie parfois caricaturale et
chaque village ou bourg valorise son église ou ses remparts comme le chef d'oeuvre local de l'art.

Pierre-Jean a dit…

Oups, le soirées trop animées me font emmeller les doigts
Le Palais de la folle chanson d'Antoine Courtens est un chef d'oeuvre de l'art déco...

Stéphane DADO a dit…

Cher Pierre-Jean,

Tu me fais penser à un vieux souvenir de lycée. J'ai été élève à l'Athénée Théo Lambert (Anderlecht), établissement qui jouxte le célèbre Parc Astrid. Dans le parc, il y avait une très belle maison du XIXe où nous avions nos cours de littérature.
Le sporting club d'Anderlecht avait prévu de râser l'édifice pour aggrandir les annexes sportives du club de foot. Nous étions quelques étudiants à manifester devant le bâtiment le jour de sa démolition, arguant que c'était un crime. La police a dû intervenir pour nous écarter. C'était en 1988...

Un an plus tard, j'avais participé à une exposition sur le patrimoine d'Anderlecht, inaugurée dans les bâtiments scolaires. Quelques autorités politiques étaient présentes. J'avais retrouvé de vieilles photos de la maison XIXe aux archives du Service des plantations de la Commune (premier propriétaire du bâtiment). Lors du vernissage, je me souviens avoir tenu des propos très violents à l'égard des dirigeants qui avaient autorisé la destruction du bâtiment. Cela a jeté un sacré froid sur le reste de la soirée...

Anonyme a dit…

Ce bâtiment s'appelait la maison des artistes. Non seulement un beau batîment mais surtout un cadre exceptionel pour les élèves de l'athénée. Que de bons souvenirs. On s'y est probablement croisé même si ton nom ne me dit rien.