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Liège, Belgium
Né à Bruxelles dans une famille d'origine grecque, turque, albanaise et bulgare. Etudes secondaires gréco-latines. Licence en Histoire de l'art, Archéologie et Musicologie de l'Université de Liège. Lauréat de la Fondation belge de la Vocation. Ancien journaliste à La Libre Belgique et La Gazette de Liège. Actuellement Chargé de mission développement et médias à l'Orchestre Philharmonique Royal de Liège. Directeur artistique-adjoint du Festival des Nuits de Septembre. Enseigne l'Histoire sociale de la musique aux Alumni de l'Université de Liège.

jeudi 19 juin 2008

La Visite de la fanfare

Une petite perle dans le paysage cinématographique israélien : La Visite de la fanfare, premier long métrage d’Eran Kolirin au scénario minimaliste. Afin d’inaugurer le centre culturel arabe de Petah Tiqva (en Israël), la fanfare de la police d’Alexandrie débarquent à l’aéroport de Tel-Aviv, vêtue de son uniforme bleu ciel, les épaulettes alignées au cordeau. Aucune délégation n’attend ces huit musiciens à l’aéroport, un manque de coordination de services administratifs sans doute. Sous la conduite de leur chef, l’autoritaire Tewfiq (Sasson Gabai) qui a des petits airs d’Omar Sharif, les musiciens estiment important de remplir leur mission en grande pompe (d’autant que les subventions allouées en dépendent) et comptent se rendre à Petah Tiqva. Une mauvaise prononciation de l’hébreu les mène pourtant à Beit Hatikva, bled perdu au milieu des sables qui vit de la répétition ennuyeuse d’un quotidien sans surprise. Trop tard pour faire marche arrière, il n’y a plus de bus avant le lendemain, et naturellement aucun hôtel sur place comme le leur apprend Dina, Israélienne d’une quarantaine d’année qui tient le café local. Dina propose l’hospitalité à Tewfiq et Khaled, le bellâtre de la fanfare, et parvient à caser les six autres musiciens chez des amis ou parents israéliens plus ou moins consentants.

Une fois l’exposition lancée, ce qui aurait pu être une farce comique sur le choc des civilisations est au contraire un dialogue des cultures sensible et intelligent, placé sous le signe de l’espoir et de la fraternité. Pas d’action véritable, mais des dialogues subtils où chacun expose (dans son anglais approximatif) sa solitude, sa quête désespérée d’amour, ses querelles familiales (les tirs de la trahison par-dessus l’oreille des invités sont parfois aussi violents que les conflits armés), des leçons de vie universelles qui dépasse le cadre de chaque culture. Lorsque les limites de la communication sont atteintes, par pudeur ou faute de vocabulaire, les délicates plages de silence, le langage des corps et la musique (Summertime, My Funny Valentine) prennent le relais.

Film résolument optimiste sur le rapprochement et la proximité des peuples (Dina révèle que les Israéliens ne manquaient aucun film arabe à la télé chaque vendredi midi), La Visite de la fanfare, suggère implicitement que cet idéal de paix est possible lorsque les convictions religieuses sont mises à l’écart. Provocation ou militantisme, la religion est d’ailleurs l’unique absente du film. Personne ne s’en plaindra.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Je joins à votre texte cette interview proposée par le site Films, Femmes et Méditerranée (SL)

"Quand j'étais enfant, je regardais souvent des films égyptiens à la télé. C'était très courant chez les familles israéliennes. Nous regardions, haletants, les intrigues compliquées, les amours impossibles et les chagrins à vous arracher des larmes d'Omar Sharif, Pathen Hamama, I'del Imam et tous les autres. C'était assez étrange, d'ailleurs, pour un pays qui passait la moitié de son temps en guerre contre l'Egypte et l'autre moitié, dans une sorte de paix froide. Les films arabes ont disparu de nos écrans depuis longtemps. La chaîne a été privatisé et elle s'est noyée parmi les 557 autres dont on nous a inondés. Nous recevons MTV, la BBC, RTL et "Israeli Idols". Alors, qui se soucie aujourd'hui des chansons en quart de ton qui durent une demi-heure ? Par la suite, Israël a construit un nouvel aéroport, oubliant de traduire les noms des routes en arabe. De nombreux films ont abordé la question de la paix que nous n'arrivons pas à obtenir, mais très peu posent la question de savoir pourquoi nous avons besoin de cette paix. Nous avons noyé l'évidence dans nos conversations sur les avantages économiques et les intérêts. Nous avons échangé l'amour vrai contre des rencontres d'une nuit, l'art contre le commerce et les rapports humains, la magie d'une conversation contre l'obsession de mettre les mains sur la plus grosse part de gâteau possible." (Eran Kolirin )

Stéphane DADO a dit…

Merci "SL" pour cette interview. Je ne suis pas surpris de voir que l'anecdote sur les films arabes est tirée de la vie du réalisateur... Cela rend le film d'autant plus vrai et touchant.