Jeudi soir, le cinéma Le Parc accueillait l'un des plus fameux clarinettistes d'Istanbul, Selim Sesler, accompagné d'un ensemble de trois musiciens : un joueur de saz (luth à manche long), un quanun (cithare utilisée dans la musique classique ottomane, jouée par Bülent Sesler), et une darbuka, tambour en calice qui remonte à l'antiquité iranienne, confié à Serkan Koçan.
Sesler est issu d'une famille de tsiganes installés en Grèce depuis des générations. En 1922, un incroyable mouvement de population voit la migration des Turcs de Grèce vers Anatolie, échangés contre des Grecs d'Asie Mineure. Les parents de Selim Sesler font partie des migrants, ils s'installent à Istanbul.
Interprétée avec une fougue et une virtuosité incroyables, la musique proposée par Sesler est une incroyable synthèse de l'art des Balkans : accents nostalgiques de la musique tzigane et klezmer avec leurs lignes de chant descendantes, couleurs des musiques populaires de Roumanie et de la Grèce du Nord, mélodies irrésistibles d'une vitalité presque triviale de la musique serbe (celle des films de Kusturica). Un tourbillon d'énergie d'une heure réellement capiteux.
La 2e partie, plus sensuelle et nostalgique, se pare des modes d'Anatolie, des danses langoureuses de la musique turque à l'instar du çiftetelli qui a bercé les musiques grecques de mon enfance (on l'appelait d'ailleurs le "turkiko tsifteteli" dans les chansons). Des souvenirs istanbuliotes refont surface : les soirées magiques à Taksim, les musiciens des restaurants populaires de Kumkapi, les danses des petites tavernes enfummées du quartier de Bakirkoÿ. Et la promesse de retourner bientôt à Istanbul!
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