Qui êtes-vous ?

Ma photo
Liège, Belgium
Né à Bruxelles dans une famille d'origine grecque, turque, albanaise et bulgare. Etudes secondaires gréco-latines. Licence en Histoire de l'art, Archéologie et Musicologie de l'Université de Liège. Lauréat de la Fondation belge de la Vocation. Ancien journaliste à La Libre Belgique et La Gazette de Liège. Actuellement Chargé de mission développement et médias à l'Orchestre Philharmonique Royal de Liège. Directeur artistique-adjoint du Festival des Nuits de Septembre. Enseigne l'Histoire sociale de la musique aux Alumni de l'Université de Liège.

vendredi 15 février 2008

Anatole France ou l'éloge du scepticisme

Je n'ai jamais compris pourquoi Anatole France n'était pas davantage lu dans les écoles ou par les amateurs de littérature. Ses livres, à commencer par La Rôtisserie de la reine Pédauque (1892) qui reste mon préféré, sont un bain de jouvence par le progressisme de ses idées et par son profond scepticisme. Et sceptique, il l'est, pourvu qu'on restitue au terme son véritable sens : celui qui examine tous les côtés des choses et qui croit en une relativité du monde. Claires, incisives, toniques, portant les marques d'un "bien écrire", les phrases d'Anatole France sont singulièrement aiguës parce qu'elles pourfendent les ridicules, elles décapent les apparences, elles dénoncent les tourments.

Chez lui, l'âpreté du désir amoureux, d'essence libertine, va de pair avec une maligne observation de la femme (à laquelle l'écrivain est un des premiers à reconnaître le droit d'étudier ou de faire carrière). Mais son talent s'aiguise et excelle lorsqu'il dénonce les préjugés de la société, les comédies de la politique, l'hypocrise des religions. Avec une sorte de pitié pour notre condition aspirant à l'absolu mais incapable de l'atteindre. Il est une sorte de Baudelaire désabusé qui a laissé de côté sa rage et sa superbe pour défendre la liberté de conscience et l'exercice du libre examen, son véritable combat. Voici quelques aphorismes pour donner la pleine mesure de cet esprit brillant :

"Le christianisme a beaucoup fait pour l'amour en en faisant un péché."

"Dans toute religion, c'est toujours le dieu qui importe le moins."

"Les amants qui aiment bien n'écrivent pas leur bonheur."

"Un homme politique ne doit pas devancer les circonstances. C'est un tort que d'avoir raison trop tôt."

"Dans l'amour, une femme se prête plutôt qu'elle ne se donne."

"L'aumône fait du bien à celui qui donne et du mal à celui qui reçoit."

"Il est dans la nature humaine de penser sagement et d'agir d'une façon absurde."

"Les hommes qu'il chérissait en masse, il les méprisait en particulier."

"L'amour est comme la dévotion, il vient tard."

"Un sceptique ne se révolte jamais contre les lois, car il n'a pas espéré qu'on pût imaginer en faire de bonnes."

"Quand on veut rendre les hommes bons et sages, libres, modérés, généreux, on est amené fatalement à vouloir les tuer tous."

"Le souvenir du bonheur nous est plus précieux que le bonheur même, sans doute parce que le présent nous échappe et que nous ne vivons que dans le passé."

"Sa foi restait intacte puisqu'il n'y avait jamais touché."

"Sainte mère de Dieu, vous qui avez conçu sans pécher, accordez-moi la grâce de pécher sans concevoir."

"L'humilité, rare chez les doctes, l'est encore plus chez les ignares."

"Il n'y a plus que les bibliophiles qui aient des bibliothèques, et l'on sait que cette espère d'hommes ne lit jamais."

"L'histoire n'est pas une science, c'est un art et on n'y réussit que par l'imagination."

"Les oeuvres que tout le monde admire sont celles que personne n'examine."

"Il n'est point aisé d'être léger quand on n'est point vide."

"Nous n'avons point d'Etat. Nous avons des administrations. Ce que nous appelons la raison d'Etat, c'est la raison des bureaux."

"La postérité n'est impartiale que si elle est indifférente."

"J'ai passé l'âge heureux où l'on admire ce que l'on ne comprend pas."

"Ignore-toi toi-même, c'est le premier précepte de la sagesse."

"Le véritable appui d'un gouvernement, c'est l'opposition."

"La justice peut être fausse : c'est un système. La piété ne trompe jamais : c'est un sentiment."

"Il n'est pas assez intelligent pour douter."

"A mesure qu'on avance dans la vie, on s'aperçoit que le courage le plus rare est celui de penser."


9 commentaires:

Anonyme a dit…
Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.
Stéphane DADO a dit…

Blogeurs frustrés ou médiocres passez votre chemin, on se passera à notre tour de vos jugements péremptoires et inutile...
Et si France vous semble sans intérêt, Martial vous sera détestable. Et c'est tant mieux... :
"Tu critiques, Velox, une longue épigramme.
Toi-même fait plus bref, puisque tu n'écris rien."

Anonyme a dit…

Contrairement aux esprits chagrins anonymes, je trouve au contraire que les citations d'AF donnent envie de connaître son oeuvre et qu'elles sont d'une belle profondeur. De quel droit vous permettez vous de juger des phrases comme "Il n'est pas assez intelligent pour douter" ou "Il est dans la nature humaine de penser sagement et d'agir d'une façon absurde". Vous n'avez effectivement pas l'intelligence suffisante pour douter de votre propre banalité. AG

Anonyme a dit…

Pourquoi avoir supprimé le premier "commentaire" ? qui disait quoi? Apparemment pas du bien d'Anatole France! Mais du coup on ne comprend pas ta réaction ni celle d'Alain.

Anonyme a dit…

Le purgatoire voire l'oubli dans lequel est tombé Anatole France(comme beaucoup de ses contemporains) tient paradoxalement, au moins en France, à son nom !! Si je me rappelle mes études lycéennes, on le considérait comme un écrivain académique, officiel. Au moins les Belges n'ont pas cet inconvénient !

Rocher a dit…

C'est vrai que c'est dommage d'avoir "viré" l'anonyme...
C'est vrai aussi qu'Anatole France est quasiment sorti des référenciels de lecture, mais pas des mémoires, je n'ai pas trouvé de statistiques sur le nombre d'écoles primaires, de collèges et de lycées qui portent son nom et des milliers d'élèves entendent parler de lui etde son oeuvre au moins dans le livret qui présente leur établissement, sans parler des places, avenues et rues, d'une station de métro qui m'annonce l'arrivée à bon port
"Envions-le, sa destinée et son cœur lui firent le sort le plus grand : il fut un moment de la conscience humaine." ce n'est pas de moi, mais de lui lorsqu'il fit l'éloge funèbre de Zola.
Et cela vaut maintenant pour lui et ceux d'un passé plus récent, ceux à venir qui ont eu et auront le don et le talent de parler et d'écrire, de s'engager pour des causes et des combats qui grandissent l'Homme
Donc merci pour ces moments de plaisir que tu nous donnes à la lecture de tes posts ... sois moins virulent avec ceux qui ne sont pas d'accord avec toi, tu n'en seras que plus convaincant,tu maîtrises suffisamment l'argumentation pour te laisser aller à des propos cinglants (surtout si on ne peut pas lire ce qui a été écrit)!

PS : autorisation de "virage"

Rocher a dit…

il faut lire
...pour ne pas te laissezr aller ...

Stéphane DADO a dit…

Merci pour vos commentaires à tous. Pour répondre à Jean-Pierre (R.), j'ai viré le message sous le coup de la colère. Je t'avoue que j'ai trouvé cela injuste pour l'écrivain, péremptoire et stupide aussi. L'anonymat comme le pseudonymat, expression qu'emploie Jacques Julliard dans son dernier livre (La reine du monde) me semblent lâches et je n'aime pas les gens qui n'ont pas le courage de leurs opinions.
En gros, le message disait ceci : "Ce n'est pas avec ces propos banals et prétentieux qu'on a envie de relire Anatole France".
Mon sang n'a fait qu'un tour... mais ce n'était rien de très méchant. J'ai constitué ce blog pour partager mes enthousiasmes, et si cela ne plaît pas à certains lecteurs, qu'ils passent leur chemin plutôt que de déverser leur venin... Heureusement que les esprits obtus sont très minoritaires parmi les lecteurs.

Cela dit, il y a effectivement des pages académiques chez l'auteur, plus politiquement correctes, celles qu'on fait sans doute lire aux écoliers français parce qu'elles sont moins subversives, je pense au "Lys rouge"... mais s'arrêter à ces pages serait aussi ridicule que de juger Proust par "L'indifférent", sans avoir rien lu de "La Recherche".

Quant à savoir si les écoliers belges ont France inscrit à leur programme, rien n'est moins sûr...

Si, comme le déclare Jean-Pierre (W.), Anatole France est effectivement attaché à la mémoire collective française, c'est beaucoup moins le cas en Belgique. Ce serait plutôt Camille Lemonnier... Je ne pense pas avoir entendu parler de France au cours de littérature. J'avais à vraie dire une prof qui ne nous parlait que de Proust, Pirandello, Bernhard, Ponge, Baudelaire, Beckett ou Mann. Je ne peux lui donner tort avec le recul...

Anonyme a dit…

Puis-je ajouter qu'Anatole France fut probablement un des modèles du Bergotte de la "Recherche"....
Marianne