La pop star vénitienne Patty Pravo, de son vrai nom Nicoletta Strambelli, vient de fêter ses 60 ans ce 9 avril. Véritable icône de l'Italie contemporaine, Pravo est pour les Italiens le prototype de l'artiste d'avant-garde contestataire.
Il faut dire que son enfance vénitienne y est pour beaucoup. Ses parents fréquentent les personnalités de la ville, à commencer par l'écrivain Ezra Pound et le Cardinal Roncalli (le futur Pape Jean XXIII), des modèles de conservatisme qui l'ennuient. Jeune fille turbulente allergique à l'atmosphère de son pensionnat catholique, elle se sauve à trois reprises optant de son chef, à la fin des années 50, pour un enseignement dans une école publique. En parallèle, elle suit une formation musicale (piano, direction d'orchestre!) au Conservatoire Benedetto Marcello. Indépendante et excentrique, elle aime la compagnie des artistes et passe son temps chez Peggy Guggenheim (en y faisant souvent ses devoirs) aux côtés des artistes de la Biennale.
Souhaitant apprendre l'anglais, elle quitte brutalement Venise pour Londres et se fait engager comme danseuse dans une boîte de Piccadilly. Elle part ensuite pour Rome où elle est engagée au Piper Club, la boîte à la mode décorée par Andy Warhol, haut lieu de la beat italienne. Elle y entame dès 1966 ses débuts comme chanteuse, devenant dans l'imaginaire collectif la "Figlia" ou la "Ragazza del Piper". C'est à ce moment-là qu'elle prend comme nom d'artiste Patty Pravo, une référence volontaire à la Divine Comédie de Dante et à ses "anime prave", les âmes corrompues, perverses de L'Enfer auxquelles elle s'identifie (quant à Patty, le prénom était très à la mode à l’époqueà.
Le disque de ses débuts, Ragazzo triste (Jeune homme triste), obtient un immense succès au point d'être même la première chanson pop transmise sur les ondes de Radio Vatican. Cependant, sa carrière explose en 1968 (Pravo a tout juste 20 ans) avec La bambola (la poupée), un succès planétaire, repris notamment par Sylvie Vartan, où elle clame de sa voix grave et veloutée son refus d'une instrumentalisation des femmes. Le disque se vend dès le début à 9 millions de copies et se trouve en première place dans les palmarès en Italie et en France, en Espagne, au Japon, en France, en Allemagne et en Amérique du Sud.
Dans les années 70, Pravo se tourne vers les chansons des Beatles, de Jacques Brel, Léo Ferré, Lucio Battisti, Vinicius de Moraes et Neil Diamond. Une décennie plus tard, agacée par la pop formatée des années 80 aux antipodes de son goût pour la musique rock, elle part quelques temps aux Etats-Unis et épouse le guitariste américain Jack Johnson (un cas fameux de trigamie : ses deux précédents mariages n'avaient pas été annulés)! Elle revient en Italie aux milieux des années 80, pour se produire entre autres au Festival de San Remo avec une reprise de La bambola dans une tenue orientale dessinée par Versace. Arrêtée pour détention de stupéfiants en 1992 (les détenues qui la virent débarquer dans la prison romaine de Rebibbia entamèrent Ragazzo triste en la voyant), elle part dès sa libération en Chine où à partir de 1994, elle obtient un succès énorme. En 1997, elle reçoit le prix de la Critique au Festival de San Remo. Toujours très présente sur la scène italienne, elle touche un public de trois générations qui lui est très fidèle. Elle vit depuis deux ans à Rome. Son dernier album, Spero che ti piaccia...Pour toi, paru fin 2007, est un superbe hommage à Dalida à l'occasion des 20 ans de sa disparition. Outre les trois chansons ci-dessous, je recommande l'album Gli anni '70 sur Itunes pour découvrir cette voix sombre au vibrato si caractéristique.
Ragazzo triste(1966)
La bambola (1968)
La spada nel cuore (1970)
Qui êtes-vous ?
- Stéphane DADO
- Liège, Belgium
- Né à Bruxelles dans une famille d'origine grecque, turque, albanaise et bulgare. Etudes secondaires gréco-latines. Licence en Histoire de l'art, Archéologie et Musicologie de l'Université de Liège. Lauréat de la Fondation belge de la Vocation. Ancien journaliste à La Libre Belgique et La Gazette de Liège. Actuellement Chargé de mission développement et médias à l'Orchestre Philharmonique Royal de Liège. Directeur artistique-adjoint du Festival des Nuits de Septembre. Enseigne l'Histoire sociale de la musique aux Alumni de l'Université de Liège.
1 commentaire:
j'apprécie beaucoup Mina et aussi Pravo que j'ai connue avec Dimmi che non vuoi morire, et ensuite avec le disque Notti guai libertà...j'ai été cependant peinée de la voir liftée ! quelle épidémie !
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